J’ai conduit une étude en septembre 2012 sur les pratiques professionnelles des documentalistes. Plus exactement, je me suis intéressé aux activités méta-fonctionnelles. Les résultats de l’étude sont téléchargeables ci-dessous.

Sous le vocable d’activités méta-fonctionnelles sont visées des activités marginales, non reconnues souvent, mais finalement essentielles pour l’efficacité quotidienne. Ces activités cachées et pas toujours assumées ouvrent la voie de la compétence. Agir et raisonner dans l’action pour transformer notre environnement et résoudre les problèmes professionnels , c’est fonctionnel. Mais quand nous observons, comprenons, déduisons, synthétisons et ordonnons dans un ensemble de significations, mais aussi quand nous construisons nos instruments cognitifs et même parfois matériels, alors nous agissons sur un plan méta-fonctionnel.

Les activités méta-fonctionnelles
« Il s’agit d’activités non directement orientées vers la production immédiate, activités de construction de connaissances ou d’outils (outils matériels ou outils cognitifs), destinés à une utilisation ultérieure éventuelle, et visant à faciliter l’exécution de la tâche ou à améliorer la performance.
Ces activités prennent place en marge du travail (elles viennent se greffer sur le temps de travail, en parallèle à l’activité fonctionnelle ou lors de phases de moindre activité), et trouvent leur source dans le travail : ce sont des faits se produisant lors du travail qui provoquent l’apparition d’activités méta-fonctionnelles. Ces deux aspects leur confèrent un caractère parasitaire (parasitisme temporel et génétique) par rapport à l’activité.
[…] Les activités méta-fonctionnelles sont parfois, mais rarement, formalisées et reconnues. Le plus souvent, elles sont spontanées et ignorées. Elles sont dans certains cas clandestines et combattues par l’organisation. Or il s’agit d’activités nécessaires pour l’évolution et le développement du savoir technique ». Pierre Falzon.

Qu’en savons-nous, la plupart du temps  ? Focalisés sur les résultats et la performance, nous pouvons passer à coté de ce volet essentiel de la réussite. Nous avons peu conscience de comment, transformant le monde, nous nous développons par le travail. Les routines nous aveuglent bien souvent.

L’opportunité de l’étude m’a été fournie par les 25emes Journées du Réseau national des documentalistes hospitaliers (RNDH). Invité à prononcer une conférence, je me suis mis en chantier. Deux réseaux ont bien voulu se prêter au jeu, le RNDH et le Réseau national documentaire de l’enseignement agricole (RENADOC). Si « comparaison n’est pas raison », l’approche comparative m’aide tout de même singulièrement à me repérer lorsque j’aborde une nouvelle problématique.

Avec trois complices, je me suis livré à une analyse rapide du travail des documentalistes. L’objectif était d’établir une première liste d’activités fonctionnelles et méta-fonctionnelles. Les référentiels de compétences et leurs prescriptions ne nous étaient d’aucun secours, nous voulions saisir les « activités », ce qui est fait effectivement par les documentalistes. Pas ce qu’ils auraient du faire pour être de bons documentalistes, conformes aux attentes des employeurs.

Cette étude a pris un tour plus original quand la décision a été prise de soumettre un questionnaire aux professionnels. Nous voulions valider statistiquement nos hypothèses sur la coexistence d’activités fonctionnelles et méta-fonctionnelles dans le quotidien des documentalistes.

En conclusion, je propose de regarder un peu autrement le processus cognitif de construction de nos compétences. Ces pistes sont assez nouvelles, au moins pour moi… J’étais déjà familier, en didactique professionnelle, de la problématique du « sujet capable » formulée par Pierre Rabardel, je découvre l’intrication de l’organisation cognitive des activités fonctionnelles et méta-fonctionnelles. Le schème de diagnostic, d’action et d’évaluation, recèle des mystères insoupçonnables.

J’énonce également quelques préconisations pédagogiques pour former les documentalistes à cette qualité du travail bien fait et tellement satisfaisant, provenant en droite ligne des activités méta-fonctionnelles.

Les résultats  de l’étude seront présentés lors de la conférence.  Exploratoire sous bien des aspects, cette étude me fait progresser dans une direction peu suivie, celle où l’analyse du travail d’un individu ou d’un petit groupe est mise en perspective avec une plus grande population. La question m’intrigue toujours : ce que nous découvrons à l’échelle individuelle est-il aussi pertinent et juste à l’échelle d’une communauté professionnelle ? En la matière, la didactique professionnelle ne fait que poser une hypothèse qu’elle ne vérifie pas assez…

 

Mon support lors de la conférence

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Annexe statistique

Annexe qualitative

Voir l’article paru sur les Journées du RNDH

 La suite ?

• L’article pour le réseau RENADOC est sorti : à lire ICI.
• Une communication lors du congrès de l’AREF en aout 2013
• Un article à écrire pour une revue en sciences de l’éducation suite à des entretiens complémentaires.

 

Bibliographie

Falzon, P. (1994). Les activités méta-fonctionnelles et leur assistance. Le Travail Humain, 57
(1), 1-23.

Pastré, P., Mayen, P., & Vergnaud, G. (2006). La didactique professionnelle. Revue française de pédagogie, 154, 145-198.

Rabardel, P., & Pastré, P. (2005). Modèles du sujet pour la conception. Dialectiques activités développement. Toulouse: Octarès.

Bref, je suis bibliothécaire